di Annie Gamet
Une nouvelle accusation de viol contre un député fraîchement élu s’ajoute aux deux plaintes précédentes pour lesquelles la justice avait prononcé un non-lieu, faute de preuves clairement établies. Les faits rapportés par la presse d’investigation au lendemain de l’élection sont, dit-on, d’une extrême gravité, ils remontent à plus de dix ans selon la plaignante qui a gardé l’anonymat. Pas d’ouverture d’enquête judiciaire, à ce stade. Un tel flou mériterait peut-être que la présomption d’innocence ne soit pas oubliée ; qu’à cela ne tienne, la vertueuse députée écologiste promet un beau chahut à l’assemblée quand s’y présentera cet individu si méprisable. Face à cette affaire et à tant d’autres très largement médiatisées, mais pas toujours vérifiées, ce qui malheureusement jette le discrédit sur les véritables drames, est-il seulement permis de douter que la libération de la parole des femmes depuis l’avènement de me too, soit à coup sûr et sans équivoque l’expression de la vérité, censée aboutir à des relations plus apaisées entre les hommes et les femmes, si du moins c’est le but recherché ?
Suite aux considérations inspirées par la multiplication de telles situations, et par la glose insipide qui les encombre immanquablement, j’ai eu avec ma vieille amie Maryse, un échange très particulier. Comment me suis-je trouvée destinataire de sa confidence ? Ce soir-là sans doute, au bout de la jetée face à l’immensité de la mer, notre proximité de pensée et la rencontre de nos sensibilités lui a donné la certitude de pouvoir être écoutée sans préjugé et entendue dans sa vérité.
L’histoire qu’elle s’est remémorée devant moi remonte à l’époque très lointaine de ses 22 ans, en 1968, alors qu’elle terminait sa licence de lettres à l’université de Lille. Les sessions d’examen avaient été reportées au mois de septembre à cause des manifestations et des grèves de mai pour l’ensemble des étudiants, mais pas pour ceux qui comme elle avaient un contrat avec l’état. Ce matin-là, elle se rendait à la fac, à pied comme d’habitude, pour voir si les résultats étaient enfin affichés.