George Floyd, un noir mort sous le genou d’un blanc

Certains diplomates et politologues évoquent même une évolution vers « une tiers-mondisation » du pays en raison des 100000 décès dus au coronavirus ! la crise sanitaire révèle surtout un pays miné par les inégalités, profondément ségrégué où le rêve américain ne semble plus qu’un lointain souvenir.

En effet, Georges Packer dans « L’Amérique défaite » (2015) écrit « we ara living in a failed state », nous vivons dans un pays en faillite (ou qui a failli), un pays à la dérive, son système économique et social en faillite, son leadership gravement altéré dans le monde…

Jusqu’à maintenant, Trump, un président très contesté (il a passé son temps à limoger ceux qui n’allaient pas dans son sens) n’était qu’une cible secondaire et en arrière-plan pour les millions de manifestants mobilisés depuis la mort de George Floyd.

Dorénavant et à partir de maintenant, et probablement jusqu’aux élections de novembre, il semble devenir le point de mire national des protestations et un facteur de divisions et de chaos au sein de son gouvernement. Tout se passe comme si on le désignait, personnellement, comme responsable de ce qui se passe actuellement, par le biais de la contestation générale dans tout le pays.

Après la requalification mercredi dernier, le 3 juin, de la mort de George Floyd en «meurtre» et l’inculpation des quatre policiers, le mécontentement a changé de direction pour se tourner vers Donald Trump, en personne. Dans l’entourage du président américain, on cherche à tempérer les choses en prétendant que ce n’est pas la panique mais seulement un mauvais moment à passer.

Trump se fait photographier devant une église bible à la main.La Maison Blanche évoqua Churchill et défend vigoureusement la sortie controversée de Donald Trump, bible à la main, devant une église proche de la Maison Blanche après la dispersion brutale des manifestants à coups de gaz lacrymogènes. Le président voulait faire passer un message fort, a expliqué sa porte-parole Kayleigh McEnany, assurant qu’il marchait dans les pas de grandes figures telles que l’ancien Premier ministre britannique Winston Churchill.

“A travers les âges, nous avons vu des présidents et des dirigeants qui ont connu des moments de leadership et de symboles très forts qui étaient importants pour un pays”, a-t-elle ajouté. Comme Churchill qui était allé constater les dégâts causés par les bombes, à Londres durant la Seconde guerre mondiale, on peut considérer que ce fut un puissant message de leadership adressé au peuple britannique ; on a aussi évoqué le moment où George W. Bush avait symboliquement effectué le premier lancer lors d’un match de baseball au Yankee Stadium à New York peu après les attentats du 11-septembre 2001. Mais rien n’est moins sûr que ces moments qui se veulent forts… Aux protestations des épiscopaliens de St. John, qui ont peu goûté l’opération de « com », s’ajoutent les divisions de la mouvance protestante évangélique et conservatrice, à qui la photo de Lafayette Park était destinée.

Si le pasteur Robert Jeffress, l’un des plus fanatiques soutiens de Trump, admire la «démonstration de force et de calme dans le chaos», Pat Robertson, figure légendaire et médiatique de la droite religieuse, critique vertement ce recours politique à la Bible.

Au Congrès, l’affaire suscite gêne et silence dans les rangs du Sénat majoritairement républicain, inquiet des conséquences électorales. Au vu des dernières enquêtes, le coup de Lafayette Park n’a visiblement pas ébranlé la base mais pourrait provoquer la débandade des électeurs indépendants dans plusieurs Etats clés, dont l’Ohio et le Wisconsin, qui avaient assuré la victoire en 2016. Au Texas, que Donald Trump avait emporté avec 9 points d’avance, il est à égalité avec le démocrate Joe Biden. En Arizona, fief trumpiste jusqu’alors, Biden a pris l’avantage. L’entourage de Donald Trump mise toujours sur un possible regain du candidat sortant s’il réussit à se vendre comme le représentant de la loi et de l’ordre et reproduit la formule victorieuse de Richard Nixon, élu en réponse aux grandes insurrections de 1968.

La décision de Donald Trump de se rendre lundi, à pied, devant l’église Saint John, bâtiment emblématique situé tout près de la Maison Blanche qui avait été dégradé la veille lors de manifestations, -il faut le souligner- a donc fait l’objet de vives critiques. Nombre de responsables politiques et religieux ont dénoncé la façon dont les manifestants avaient été violemment dispersés pour permettre au président de se faire photographier devant le bâtiment. Ils ont aussi déploré la façon dont le locataire de la Maison Blanche avait brandi une bible devant les photographes. L’évêque épiscopalienne de Washington, Madame Mariann Budde, est allée jusqu’à dénoncer une initiative “profondément insultante”, le détournement de “quelque chose de sacré pour une posture politique”.

Cornel West, professeur de philosophie à Harvard, parlait dans une interview (France 24 du vendredi 5 juin 2020) de Constantin, cet empereur romain qui fit, (symboliquement pour Trump, sa Bible à la main), jouer la religion comme un moteur essentiel à ses projets.

Depuis son entrée en lice dans les primaires du Parti républicain en 2015, le milliardaire, populiste roué et expert du bombardement émotionnel, a réussi à bouleverser les règles de la communication politique en misant sur l’outrance et l’écrasement des tabous pour galvaniser ses électeurs les plus fidèles. Cette fois, il semble avoir dépassé les bornes, au point de mettre en danger sa réélection en étant allé peut-être trop loin. Lundi 1er juin, il exigeait des gouverneurs, en vain, qu’ils fassent appel à la garde nationale fédérale face aux centaines de milliers d’Américains dénonçant les bavures répétées des polices locales, l’iniquité du système judiciaire envers les minorités et la persistance du racisme dans la société américaine. Le lendemain, le Président répétait son projet de recourir à la loi sur l’insurrection de 1807 (!) pour déployer l’armée dans les villes touchées par la contestation. Au cours de la même conférence de presse, il lançait l’armée et la police fédérale, compétente à Washington, pour disperser à coups de matraques et de gaz lacrymogènes une manifestation autorisée et pacifique dans Lafayette Park, à quelques mètres de la Maison Blanche, dans le seul but d’aller prendre la pose, une Bible à la main, devant l’église qui, par ailleurs, a été endommagée par des casseurs.

Mercredi, le secrétaire à la Défense, en personne, Mark Esper, a pris, sans ambages et sans détours, le contre-pied des positions et propositions de Donald Trump. Dans un texte lu devant la presse, vu dans le monde entier, il est allé jusqu’à désavouer formellement l’appel du Président à recourir à la loi sur l’insurrection pour déployer l’armée américaine, disant : «L’utilisation des forces armées comme forces de l’ordre intérieures n’est qu’une option de dernier recours, valable dans les cas d’extrême urgence et de situation périlleuse. Nous ne sommes pas dans cette situation.».

Beaucoup d’analystes et de politologues ont vu dans ce désavouement une grave crise au sommet de l’Etat mais surtout une sorte de rejet pur et simple de ce qui émane de la personne même de Trump. Il n’a pas congédié instantanément le dissident, on peut l’appeler ainsi, de crainte d’accentuer l’impression chaotique et remplie de dysfonctionnements qui émane de son gouvernement. Le sort d’Esper est et paraît, réellement, en suspens, Trump prend ainsi la mesure de la rébellion des militaires ; en avril, déjà, le Président avait installé au Pentagone l’un de ses plus loyaux conseillers pour jauger la loyauté des gradés et préparer des purges éventuelles.

Et ce n’est pas fini : Trump a subi une autre offensive galonnée jeudi. Son ex-secrétaire à la Défense, James Mattis, général adulé de l’offensive américaine de Falloujah en Irak (ce qui est un autre scandale intolérable, totalement oblitéré par le temps et par le désintérêt des analystes et des historiens arabes) a rompu dix-huit mois de silence, depuis sa démission, pour s’ériger contre l’abus de pouvoir de Donald Trump. Le mot a été lâché : l’abus de pouvoir ! Notoirement discret sur les affaires politiques, le fleuron des Marines, incarnation du service public américain, conspua un président «qui ne cherche qu’à nous diviser» et «ridiculise la Constitution». Mattis s’insurge contre un recours aux militaires qui ne ferait que créer un faux conflit entre les forces armées et les civils. L’ex-ministre avait créé un choc pour les observateurs, les journalistes et les politologues, car sa démission, certes spectaculaire, en 2018 ne portait alors que sur un désaccord sur le traitement des alliances internationales par Trump et l’ordre de retrait brutal des troupes de Syrie.

Des sujets qui n’intéressent que secondairement l’opinion publique et celle des masses. Pour l’instant, Donald Trump ne répond à tout problème que par un de ses sempiternels tweets. Le personnage de ce président est une énigme, l’objet de fascination pour certains, un homme d’affaires sans scrupules pour d’autres. Tout à son obsession électorale, il a, lors d’une interview télévisée, assuré que les leaders religieux avaient bien aimé sa photo devant l’église St. John.

Contre leurs critiques et déjà cibles de prédilection de Donald Trump dont les mouvements d’humeur les conspuent régulièrment, les médias sont également dans le viseur des forces de l’ordre depuis le début des manifestations. Aux Etats-Unis, la liberté de la presse semble réellement malmenée car elle dénonce le tournant économique et la situation extrêmement tendue, culturellement, politiquement et socialement. Parallèlement, la rhétorique du président Trump contre les journalistes exacerbe les tensions.

Comme des départs de feu dans tout le pays, des dizaines de villes ont emboîté le pas à Minneapolis, avec des rassemblements de New York à Atlanta, de Washington à Los Angeles.

L’état actuel du pays et le drame de la mort d’un homme sous le genou d’un autre homme a catalysé la colère et l’exaspération face à des décennies de brutalités policières contre les Noirs aux Etats-Unis, largement restées impunies. Les rassemblements pacifiques ont été rapidement éclipsés par les images de la violence et de la destruction. C’était le mort de trop. Le décès de George Floyd s’inscrit dans la droite ligne du sort réservé aux Afro-Américains lors de l’épidémie : surreprésentés dans les métiers du soin ou du commerce, ils sont plus victimes du Covid que les Blancs.

Les protestations se sont exportées dans nombre de pays, ne craignant plus le Covid19 parmi les manifestants ; à Paris, il y a eu une manifestation massive en mémoire d’Adama Traoré et George Floyd. Alors que les Etats-Unis se déchirent une semaine après la mort de George Floyd, au moins 20 000 personnes ont bravé l’interdiction de manifester et répondu à l’appel du collectif «Vérité pour Adama Traoré».

La fondation Mandela, du nom du premier président noir sud-africain, a estimé jeudi 4 juin que les manifestations dans le monde contre la mort de George Floyd, un Noir, entre les mains de la police américaine traduisent “une colère croissante contre la suprématie blanche continue. Les manifestants aux Etats-Unis signalent que trop c’est trop”.

La fondation Mandela dénonce un système qui crée les conditions de la violence contre les Noirs et la légitime dans de nombreux pays. On retrouve une telle violence même dans les pays où les Noirs tiennent les leviers du gouvernement, comme en Afrique du Sud. Les vingt-six années qui se sont écoulées depuis la fin officielle du régime de l’apartheid en Afrique du Sud n’ont pas permis d’assurer que les vies des Noirs importent autant que celles des Blancs.

La Fondation Mandela estime qu’il est temps de faire une évaluation de la suprématie blanche résiliente en Afrique du sud, aux Etats-Unis et dans le monde entier. Rappelons que Nelson Mandela, héros de la lutte contre le régime de l’apartheid en Afrique du Sud, système de domination de la minorité blanche, fut le premier président noir de ce pays d’Afrique australe (1994 à 1999).

Les manifestations ont lieu dans le monde entier. Les anciens présidents américains ont tous parlé, chacun y allant de sa diatribe ; Michelle Obama a sais l’occasion (trop belle) pour s’exprimer elle aussi. Mais personne n’a posé la question essentielle :

« Pourquoi la vie d’un Noir n’importe pas »

C’est là la clef du problème et de tous ceux qui en découlent, le racisme, l’exploitation, l’esclavage moderne, l’injustice, le trop grand pouvoir des puissants et de leurs affidés, les énormes écarts de fortunes entre riches et pauvres, etc. ; on a trop vite oublié qu’avant la crise sanitaire du coronavirus qui paralysé le monde entier, les manifestations se faisaient dans le monde entier pour toutes les raisons évoquées plus haut.

La vie des Noirs est importante comme celle des analphabètes, des dénutris, des enfants exploités, des femmes, des minorités, des peuples en voie d’extinction (Les Peuples d’Amazonie que Jair Bolsonaro veut exterminer, sans trop le dire, il ravage leur territoire, la forêt et leur habitat, ils vont en mourir comme ils vont mourir du Covid19 car leur immunité est particulière). 

         George Floyd a perdu la vie pour que nous nous souvenions que toute vie humaine est importante, que le racisme doit cesser au 21ème siècle et que l’injustice, toute injustice quelle qu’elle soit, est le pire fléau qui ravage l’humanité…

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