Spectres et croyances d’antan

Je me souviens parfaitement de cette histoire, parce que sur les bancs de l’école j’eus tout loisir de ressentir la honte d’avoir dit et redit à mes camarades que le camphre était utile contre le choléra. Eux, plus éveillés que moi, me tournèrent en ridicule, si bien que l’écho de tout cela parvint à l’oreille du professeur de sciences, lequel affirma devant tout le monde que je me trompais (d’où je déduisis que mon père et tous mes ancêtres se trompaient également), car si le camphre a de nombreuses vertus médicinales, il n’a certainement pas celle de tuer ou d’éloigner la bactérie du choléra. Je compris alors qu’il me faudrait remettre en question la tradition familiale si je ne voulais plus faire aussi piètre figure.

Aujourd’hui, cette histoire m’amène à réfléchir sur la manière dont après un siècle d’extraordinaires progrès technico-scientifiques dans tous les domaines de la connaissance, y compris celui de la médecine, nous nous retrouvons avec les mêmes peurs ancestrales – peut-être plus grandes du fait de l’amplification médiatique –  que lorsque les gens tombaient comme des mouches et que personne n’y pouvait rien. Sont alors arrivés les antibiotiques, la pénicilline, et tous les autres remèdes et vaccins qui ont mis en échec tant de maladies dont autrefois on désespérait de guérir. À présent, nous en sommes là avec le Covid 19, le tristement célèbre coronavirus. Un jour qu’on espère le plus proche possible, les scientifiques découvriront le vaccin, la peur sera derrière nous, nous irons dans la rue, nous recommencerons à nous serrer la main et à nous embrasser : nous serons tous plus en sécurité. Mais pendant ce temps-là, qui nous dit qu’un autre virus insoupçonné n’est pas déjà en route quelque part dans ce monde interconnecté, avec l’intention de ressusciter parmi les humains les spectres d’antan ?

Spectres et croyances d’antan…

Voilà ce qui s’est passé pour moi ! Il y a quelques jours, avant que nous soyons tous contraints de fermer boutique, lors d’une visite chez un pépiniériste du coin, mon regard est tombé sur un jeune arbre haut et mince, au feuillage parfumé. Je l’ai acheté et planté sur mon terrain, et maintenant j’espère qu’il va croître en hauteur et en épaisseur, qu’il me fera de l’ombre en été et que ses effluves me maintiendront en bonne santé. Vous avez deviné son nom bien sûr : c’est le Cinnamomum camphora, ou camphrier. Si le camphre a agi contre la grippe espagnole et le choléra –  me dis-je, sans crainte qu’on se moque de moi – qui sait s’il n’aura pas le même pouvoir contre le coronavirus et tous les autres maux à venir !

[Traduzione di Annie Gamet]

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